Pourquoi est-il plus difficile d'écrire sur le Maroc quand on est Marocain ?
Écrivaine marocaine censurée, Mimi Saga dénonce l'autocensure et la "censure douce" qui étouffent la création au Maroc. Témoignage choc sur les barrières absurdes et plaidoyer pour un #MarocDesLumières. Découvrez comment le système pousse à l'exil et pourquoi son roman, Le Cartel des Visas, est devenu un symbole de résistance pour la #GenZ et pour la liberté d'expression.
MimiSaga
10/10/20255 min read
La coupe est pleine.
Je vais vous dire une chose qui devrait révolter tous ceux qui aiment ce pays : il est plus facile de diffuser un roman sur le Maroc à l'international que de le faire naître ici, sur son propre sol.
Je m’appelle Mimi Saga. Je suis écrivaine. Et dans mon propre pays, je suis devenue une clandestine de la pensée. Au début, je croyais que c’était une erreur, un malentendu. Puis j’ai compris : ce pays préfère faire taire ceux qui l’aiment trop fort.
L’histoire que je vais vous raconter n’est pas celle de mon roman. Elle est bien pire. C’est le récit d’un système qui étouffe méthodiquement ceux qui veulent le sauver par l’intelligence.
Mon parcours pour publier Le Cartel des Visas en est la triste démonstration.
1. L’ABSURDITÉ ADMINISTRATIVE
L'ISBN, ce premier barrage absurde.
J'ai frappé à des portes restées closes. Le ministère de la Culture ? Injoignable. Le service public ? Défaillant. Mon ISBN, je l'ai finalement obtenu… après avoir payé 75 Euros en France. La-bas, on m'a gentiment expliqué qu'ils ne pouvaient pas "devancer" le Maroc. Mais on m'a donné le mail du siège de l'ISBN... à Londres. J'ai écrit. Et par magie, sous 48 heures, l'impossible est devenu réalité. La réponse du service marocain à Londres ?
Un laconique : "Nous avons un problème technique."
La situation est si kafkaïenne qu'il a fallu une intervention internationale pour qu'un simple numéro, droit élémentaire d'un auteur, me soit accordé. La colonisation culturelle a trouvé ses complices : nos propres administrations.
Puis vint le second mur : la peur.
2. LA PEUR COMME SYSTÈME
Un imprimeur distributeur casablancais, un professionnel pourtant, me refuse son service. Son motif, glaçant de sincérité : " J’ai vu que tu parles de l’Algérie, Je ne veux pas aller en prison pour ton livre. "
Ce n’était pas un refus commercial. C’était l’aveu d’une maladie nationale. La peur avait gagné. Pas la peur du pouvoir, mais la peur de la peur elle-même. Nous en sommes là : les Marocains ont intériorisé leurs chaînes au point de les polir chaque matin.
Mon crime ? Avoir écrit un thriller qui évoque les visas, la France… et l'Algérie. Pas de critique du régime. De la fiction. De la fiction qui pense. Je ne parle pas de diffamation ou d'appel à la haine. Je parle de fiction. D'un thriller. Le seul crime de mon livre est d'exister et de penser.
Ma peine ? Voir un professionnel marocain refuser de publier un roman marocain. Non pour ce qu’il dit du Maroc, mais pour ce qu’il ose évoquer de l’autre côté de la frontière.
Cette "censure douce" est un symptôme. Elle illustre ce climat d'autocensure qui étouffe la création et le débat d’idées bien plus sûrement qu'une interdiction officielle.
Le système est conçu pour nous épuiser, nous décourager, nous exclure.
C'est cette même logique qui pousse des générations entières à l'exil. La #GenZ qui manifeste aujourd'hui pour la dignité, la liberté et la justice sociale ne fait que refuser l'héritage empoisonné de l'obstruction systématique. Sa colère, mon roman tente d'en cartographier les racines géopolitiques et économiques.
Pourquoi compliquent-ils tout pour les Marocains ?
Pourquoi les seuls récits autorisés sur le Maroc doivent-ils être signés par des auteurs étrangers ou déracinés ? C'est cette question qui a motivé mon premier livre. Nous sommes dépossédés de notre propre narration. Regardez autour de vous. Les ouvrages qui parlent de nous et qui voyagent sont rarement les nôtres. On nous vole notre propre récit. On nous réduit au silence, puis on paie des experts pour analyser… notre mutisme. Ces jeunes sont mes premiers lecteurs. Ils comprennent ce que les bureaucrates refusent d’entendre : une nation qui étouffe ses rêves se condamne elle-même.
Alors j'ai décidé de créer mon propre espace. Mon propre pays de papier.
3. LA NAISSANCE DE TIFAWEN
Aujourd'hui, puisque le système bloque la diffusion physique de mon livre, j'écris ici, sur "Tifawen" – la lumière en Amazigh. Ce Blog est né de cet incident absurde avec l'imprimeur. C'est ma réponse. Si on me refuse l'encre, j'écrirai avec de la lumière.
Tifawen, c'est plus qu'un site. C'est un acte.
C'est le contre-feu à la censure douce. C'est le lieu où les récits interdits, les chroniques qui dérangent et les manuscrits qui pensent trouvent refuge. C'est un Maroc qui s'éclaire lui-même, qui s'éveille et qui se révèle, malgré ceux qui préfèrent l'obscurité. Un vrai Maroc des Lumières.
Votre soutien ne se limite pas à acheter un livre.
C'est adhérer à une idée.
Chaque visite sur Tifawen, chaque partage, chaque lecture est un refus du silence imposé. C'est dire : "Ici, nous possédons notre narration. Ici, la peur ne gagne pas."
Parce qu'un livre n'est pas un danger. L'ignorance, si.
Parce qu'un peuple qui ne peut pas se raconter est un peuple qui disparaît.
Et nous, nous avons décidé de rester, et de briller.
La coupe est pleine. Mais de cette amertume, nous ferons de l'encre.
Quand j'ai dû obtenir mon ISBN en France...
Quand vous devez quitter le pays pour trouver un avenir...
C'est le même système qui nous rejette. Le système est une machine à fabriquer de l’exil. Il pousse nos cerveaux à s’envoler, nos voix à se taire, nos livres à naître ailleurs.
Quand un imprimeur marocain refuse un livre marocain par peur...
Quand un jeune diplômé quitte le pays par désespoir...
Ce sont les deux faces d’une même médaille : La peur a gagné.
Mais la #GenZ a changé la donne. Elle refuse cet héritage empoisonné. Sa révolte est le contre-poison de nos silences.
Aujourd’hui, les jeunes dans la rue et moi, écrivaine censurée, nous disons la même chose : Assez.
Assez de devoir mendier notre propre reconnaissance.
Assez de cette peur qui ronge nos ambitions.
Assez de devoir partir pour exister.
Si vous voulez comprendre pourquoi ils descendent dans la rue,
Si vous voulez saisir l’urgence de ce moment historique,
Lisez Le Cartel des Visas.
Ce n’est pas qu’un thriller.
C’est le miroir de ce qui se joue aujourd’hui dans nos rues.
Chaque livre acheté est un coup de marteau dans le mur du silence.
Chaque page lue est une main tendue à cette jeunesse qui se bat pour rester sans être humiliée.
La coupe est pleine.
Mais de cette amertume,
Nous ferons de l’encre.
Ils en feront de l’histoire.
Lisez, partagez, faites circuler. Parce que le silence ne se combat pas par les armes, mais par la lumière.
✍️ Mimi Saga
Auteure de "Le Cartel des Visas", un thriller né malgré tout.
📚 Retrouvez Le Cartel des Visas dans son édition limitée sur Tifawen
ou en version ePub sur Tifawen.
Pour celles et ceux qui préfèrent Amazon, le roman est aussi disponible en
version broché et version Kindle.
Parce que le premier acte de résistance, c’est de continuer à lire.
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